L'Algérie aux urnes, Bouteflika vote en fauteuil roulant
L'Algérie aux urnes,
Bouteflika vote en fauteuil roulant
AFP 17 AVRIL 2014
Une affiche d'Ali Benflis collée sur
une rangée de portraits d'Abdelaziz Bouteflika, le 15 avril dans le centre
d'Alger. (Photo Patrick Baz. AFP)
Le chef de l'Etat,
favori du scrutin et briguant un quatrième mandat, n'était plus reparu en
public depuis deux ans.
Les Algériens ont
commencé jeudi à élire leur président lors d’un scrutin a priori sans surprise,
le sortant Abdelaziz Bouteflika apparaissant comme le favori malgré ses ennuis
de santé. Ouverts depuis 8 heures (9 heures en France), les bureaux de vote
doivent fermer à 19 heures (20 heures en France). Les résultats doivent être
proclamés officiellement vendredi.
Après avoir entretenu un
certain suspense, la presse semblait déjà se résigner à une reconduction
inéluctable d’Abdelaziz Bouteflika pour un quatrième mandat de cinq ans. «C’est
juste le rideau qui tombera ce soir sur un moment de théâtralisation politique
de mauvais goût», observait le quotidien El Watan, en parlant d’un «scrutin
dénué de crédibilité et d’ouverture». Pour Liberté, «les véritables manœuvres
commenceront au lendemain du 17» avril, le scrutin en lui-même étant «dénué
d’enjeux réels».
Souffrant encore des
séquelles d’un AVC subi il y a un an et qui a réduit ses capacités d’élocution
et de mobilité après trois mois d’hospitalisation au Val-de-Grâce à Paris,
Bouteflika, 77 ans, a voté à Alger en fauteuil roulant, selon des images
diffusées en direct par la télévision. Souriant, le chef de l’Etat est arrivé à
l’école Bachir El Ibrahimi à El Biar, sur les hauteurs d’Alger, entouré de deux
de ses frères, dont Saïd, son conseiller spécial, et d’un jeune neveu. Il a
salué la presse de la main mais n’a fait aucune déclaration. Il s'agit de la
première apparition publique de Bouteflika depuis le 8 mai 2012.
Abdelaziz Bouteflika au bureau de
vote, le 17 avril à Alger. (Photo Farouk Batiche. AFP)
Plus de 260 000
policiers et gendarmes devaient être déployés sur le terrain pour assurer la
sécurité de près de 23 millions d’électeurs appelés à voter dans 50 000 bureaux
en faveur de l’un des six candidats en lice, dont l’ex-Premier ministre Ali
Benflis et une femme, la députée trotskiste Louisa Hanoune.
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En 2012, Bouteflika
avait laissé croire à une succession ouverte en déclarant que sa génération
avait «fait son temps». Le 22 février, il a finalement annoncé sa décision de
se lancer à la conquête d’un quatrième mandat après une lutte au sommet de
l’Etat. Et malgré les doutes sur ses capacités à diriger le pays pendant un
nouveau quinquennat. Durant la campagne du 23 mars au 13 avril, les Algériens
ont pu le voir à trois reprises à la télévision recevant de prestigieux
invités. Sa maladie l’ayant empêché de mener lui-même cette campagne, il a
chargé sept de ses proches de sillonner le pays pour convaincre les électeurs.
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Quarante-huit heures
avant l’ouverture des bureaux de vote, il a exhorté les Algériens à se rendre
aux urnes parce que «l’abstention dénote une propension délibérée à vouloir
demeurer en marge de la nation». Le taux de participation sera un des enjeux de
la consultation. A la présidentielle de 2009, il était officiellement de 74,11%.
Un câble de l’ambassade américaine à Alger révélé par WikiLeaks l’avait
cependant estimé entre 25 et 30%.
Une coalition de cinq
partis d’opposition appelle au boycottage du scrutin, plaidant en faveur d’une
«transition démocratique», tandis que le mouvement Barakat («Ça suffit»),
hostile à un quatrième mandat d’Abdelaziz Bouteflika, juge que cette élection
est «un non-événement».
RÉACTION MUSCLÉE DES
FORCES DE L’ORDRE
Sa manifestation
mercredi à Alger a été empêchée sans ménagement par la police, préfigurant une
réaction musclée des forces de l’ordre si le résultat devait être contesté dans
la rue, comme on en a prêté l’intention à Ali Benflis, le principal adversaire
de Bouteflika, qui a démenti. Autre signe de cette détermination: la montée au
créneau du chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaïd Salah.
«Le peuple algérien
saura dresser un mur solide face à celui qui sera tenté d’exploiter cet
important évènement national à des fins contraires aux intérêts supérieurs du
pays», a-t-il mis en garde. Outre la participation, c’est la fraude, «mal
incurable» selon le quotidien El Watan, qui fait débat, après les récentes
révélations d’un ancien wali (préfet) confirmant que cette pratique avait bien
lieu. Principal rival de Bouteflika et connaisseur des affaires du sérail, Ali
Benflis a fait de cette question un thème majeur.
Humilié à la
présidentielle de 2004 (6%) par celui dont il fut l’homme de confiance au début
de son premier mandat (1999/2004), Benflis pense qu’une revanche est à portée
de main. Ses mises en garde répétées sur les risques de fraude ont fini par
mettre de l’électricité dans une campagne terne et par faire sortir Abdelaziz
Bouteflika de son silence.
Devant deux hôtes de
marque, le chef de la diplomatie espagnole José Manuel Marcia-Margallo puis
l’émissaire international pour la Syrie Lakhdar Brahimi, Bouteflika a accusé
Benflis – sans le nommer – de «terrorisme» et de volonté de «fitna»
(dissension). Un argument massue dans un pays qui n’a pas encore pansé les
plaies d’une guerre civile déclenchée à la suite d’un processus électoral
avorté en 1992.
Le directeur de cabinet
du chef de l’Etat, Ahmed Ouyahia, a d’ailleurs évoqué le risque de voir les
«portes de l’enfer» s’ouvrir à nouveau devant les Algériens. Des imams
salafistes ont évoqué le risque «de provoquer de nouvelles déchirures dans le
corps de la nation» qui a «retrouvé la sécurité après la peur et le désespoir».
«Nous avons une armée
puissante et des services de sécurités forts, personne ne pourra nous
déstabiliser», a menacé le directeur de campagne de Bouteflika, son ancien
Premier ministre Abdelmalek Sellal.
AFP
JEAN-LOUIS LE TOUZET ENVOYÉ SPÉCIAL À ALGER 16 AVRIL 2014
REPORTAGE
La probable réélection du sortant pour un quatrième mandat,
aujourd’hui, fait craindre un retour en arrière et des représailles envers les
opposants.
Comment interpréter les signes de nervosité de
la population algérienne, qui semble déjà anticiper l’après-présidentielle ?
Ces dernières quarante-huit heures, sur les réseaux sociaux, les témoignages
évoquaient «les ruées dans les
magasins d’alimentation», notamment
à Alger et sa périphérie : stocks de sucre, de café, queues interminables dans
les stations-service et retraits de liquide dans les banques. Difficile de
prévoir les conséquences de «l’après 17», alors que
l’on donne le président-candidat, affaibli par un AVC, reconduit à la
présidence dans «une campagne par
procuration» menée par ses proches, notamment son ancien Premier ministre. «Le pouvoir continuera de se ...
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